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De la politique publique au conseil en stratégie : Sandra Nevoux

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Dans cette série de portraits, découvrez le parcours de docteurs en économie qui ont fait le pari du conseil pour avoir un impact plus grand. Passés de la recherche à la pratique, ils reviennent sur leurs trajectoires professionnelles et les choix qui les ont menés du laboratoire à l’accompagnement stratégique des COMEX.

Sandra NevouxSandra Nevoux VeltysQuel est ton parcours académique ? 

J’ai intégré Sciences Po après le Bac. Jusqu’à la licence, j’ai suivi le tronc commun. J’ai passé ma troisième année au Trinity College, à Dublin. En Master, je me suis spécialisée en économie grâce à un triple diplôme Sciences Po – X – ENSAE. Le Master 1 était découpé entre Sciences Po et l’X et le Master 2 entre Sciences Po et l’ENSAE (École Nationale de la Statistique et de l’Administration Économique). 

Lorsque j’ai intégré Sciences Po, j’envisageais initialement une carrière internationale, dans le domaine de la diplomatie. Je me suis finalement passionnée pour  l’économie au travers des cours que j’ai suivis et ai emprunté cette voie. 

Pourquoi t’es-tu orientée vers la recherche ? 

Après un parcours scientifique au lycée, l’enseignement de l’économie a été pour moi une révélation : voir l’implication concrète et opérationnelle que pouvaient avoir les mathématiques appliquées m’a fascinée.
Je n’imaginais pas que les mathématiques pouvaient être utilisées pour répondre à des problèmes concrets, sociaux, humains. 
C’est ce que j’ai souhaité approfondir en poursuivant une thèse sur une politique publique. 

Sur quels travaux portait ta thèse ? 

J’ai souhaité me concentrer sur une politique publique spécifique et finalement assez peu connue à l’époque : l’activité partielle, également connue sous le nom de chômage partiel, et souvent confondue avec le temps partiel ou l’activité réduite. 

Mon mémoire de Master portait déjà sur ce sujet et j’ai eu la chance d’être accompagnée par un enseignant chercheur spécialiste de l’économie du travail également intéressé par cette politique publique. À l’issue de mon Master, j’ai obtenu une bourse de recherche au sein d’une chaire hybride, alliant laboratoire de recherche, établissement d’enseignement et organisme public, ce qui m’a permis de continuer mes recherches sur ce sujet qui me passionnait. 

J’ai donc fait ma thèse entre 2013 et 2018, à cheval entre l’X et la DARES (Direction de l’Animation et de la Recherche des Études et des Statistiques – service service statistique du Ministère du Travail) . 

J’ai travaillé sur une thèse que je qualifierais de « monolithique » car elle se concentrait sur un seul sujet spécifique et je l’ai articulée autour de trois axes : 

  • Évaluer l’impact du dispositif sur la survie des entreprises et la préservation de l’emploi en leur sein ;
  • Analyser la diffusion locale du recours au dispositif (la proximité géographique d’établissements ayant déjà recouru au dispositif par le passé pouvant, pour un établissement donné, améliorer sa propre connaissance du dispositif et par suite son recours à ce dispositif) ;
  • Analyser le recours récurrent à ce dispositif et en chiffrer l’impact, à la fois en termes financiers (finances publiques) et sociaux (réallocation de la main d’oeuvre)

 

Quelles sont les compétences que tu as développées et dont tu as eu besoin pour réussir ta thèse ? 

Connaissance, recul, maîtrise à la fois des outils et des méthodes quantitatives, des statistiques et de l’économétrie, que je n’aurais jamais eus sans ma thèse. 

J’ai également enseigné et ai trouvé cela très stimulant. Je suis persuadée que cela m’a fait développer des compétences que je n’avais pas par ailleurs. En outre, enseigner des matières qui ne constituent pas nécessairement notre domaine de spécialité incite à monter en compétence rapidement et de manière très approfondie sur un sujet. 

Participer à des séminaires a également été un beau challenge : il faut se présenter et défendre son sujet, même si l’auditoire n’est pas toujours très réceptif. Je n’aurai peut-être plus jamais l’occasion d’approfondir autant un sujet. On en apprend beaucoup sur la dimension académique mais sur soi également. 
Dans « recherche », il y a « re » : on recommence jusqu’à obtenir un résultat, et c’est aussi difficile que stimulant. 
Sur mon principal chapitre de thèse, par exemple, on cherchait à estimer l’impact du dispositif. Évaluer cet impact a nécessité un certain nombre d’itérations et de revoir à plusieurs reprises la méthode employée en conséquence. 

En quoi cela t’aide-t-il dans ton travail actuel ? 

Les méthodes quantitatives que j’ai acquises m’aident énormément dans mon travail au quotidien. Ensuite, le côté itératif de véritable test, try and learn, c’est un vrai cycle agile que l’on rencontre dans notre métier de consultant. La différence, c’est la durée du cycle : le temps est beaucoup plus court, pour coller à la réalité du client. Par ailleurs, la réponse au client s’inscrit dans une optique différente de ce que l’on fait dans un cadre académique. 

Veltys consultante Sandra NevouxComment la recherche a-t-elle influencé ta carrière professionnelle ? 

Après ma thèse, j’ai voulu poursuivre dans la recherche, j’ai donc rejoint dans cette optique le secteur de la banque en tant qu’économiste-chercheur spécialisé du marché du travail, et ce, pendant 3 ans. 
À l’issue de ces 3 ans, j’ai souhaité m’orienter vers des sujets plus concrets, plus opérationnels et impliquant davantage de travail en équipe. Le travail de recherche a ses vertus mais reste une démarche assez solitaire. À ce moment je me suis posé la question de rejoindre une structure institutionnelle au sein de laquelle je poursuivrais sur des sujets d’économie du travail, ou bien de rejoindre l’univers du conseil en data. C’est vers cette dernière option que je me suis finalement tournée. En effet, il y a de nombreux sujets passionnants au-delà de l’économie du travail au sein desquels la data a un rôle à jouer et peut créer de la valeur. 

Si tu devais le refaire, traiterais-tu tes travaux différemment ? 

Non, parce même si je n’ai pas choisi les sujets les plus « sexy » du secteur privé, je les ai trouvés intéressants et cela me semblait important de les aborder d’un point de vue global. Je ne changerais pas la trajectoire ! 

Pourquoi avoir choisi de travailler pour un cabinet de conseil en stratégie et data science plutôt que de poursuivre une carrière universitaire ? 

J’avais envie de travailler sur des choses plus concrètes, opérationnelles, collaboratives et diversifiées. Ayant pas mal travaillé au sein d’institutions (para)-publiques, j’ai également souhaité rejoindre le secteur privé, secteur au sein duquel je me voyais m’inscrire sur le long-terme. De par son ADN « académique », Veltys est un cabinet de conseil connu dans le milieu de l’économie académique. 

Quels aspects ne te manquent pas ? 

Le processus de publication, qui est long, fastidieux et itératif. À l’inverse, si dans le conseil le travail est plus rythmé, il se fait également dans un temps plus limité impliquant d’aller moins loin dans la dimension technique mais de davantage mettre l’accent sur la dimension business. En recherche, on s’intéresse à éclairer la connaissance mais on se pose rarement la question de l’étape d’après : comment implémenter ces apprentissages pour en tirer de la valeur ou créer de la performance. À l’inverse, cette question est clé dans un quotidien de conseil. 

 

 

Sandra Nevoux